La vie sociale de l'empereur n'a jamais été un log fleuve tranquille à l'école. Il n'a jamais vraiment réussi à rentrer dans le moule, j'aurai envie de dire tant mieux mais du coup, il a toujours été un peu solitaire à l'heure de la récréation.
Ses cheveux trop longs, son hypersensibilité, ses émotions décuplés et sa précocité l'ont je crois éloigné des autres sans qu'il en souffre véritablement même si parfois le fait de ne pas avoir d'amis ou très peu l'a rendu assez triste, ça me rappelle quelqu'un, comme si la pomme ne tombait pas toujours si loin de l'arbre.
La solitude ce n'est pas drôle, c'est frustrant quand on voit les autres vivrent en groupe et pas soi mais je ne m'en suis jamais vraiment inquiétée car je pense que tout peut changer très vite en grandissant.
Par contre, le harcèlement, j'emploie le mot volontairement parce que je pense que la frontière est toute mince entre se faire embêter et se faire harceler, ça ça m'inquiète vraiment. On a tous été plus ou moins le moqué voir le moqueur et on se souvient encore parfois, même a l'âge adulte, des railleries dont on a été victime.
Je crois que je n'en ai jamais parlé à mes parents, parce que j'ai pensé peut être que ma mère aurait minimiser, que mon père m'aurait dit " de mon temps ça se faisait déjà", je ne sais pas, mais j'ai personnellement toujours avoir voulu savoir si mon fils ne souffrait pas du comportement des autres envers lui.
Au début de cette année de CM2, premier épisode avec un petit groupe de camarades qui le suivait partout à la récréation, qui le collait, qui lui disait des noms d'oiseaux. L'empereur m'en a parlé et si au départ je n'ai pas voulu intervenir directement, j'ai fini après plusieurs semaines par en parler avec la maitresse. Sans les punir, juste en dialoguant avec toute la classe, au bout de deux jours, tout est rentré dans l'ordre.
Avant d'avoir des enfants et par rapport certainement à mon propre vécu, pas de souci, je me disais que c'était des histoires de gosses et que ce n'était qu'un passage presque obligé, mais en fait pas du tout. Ce n'est pas rien, ce n'est pas anodin, et parfois non ça ne passera pas tout seul, même si notre enfant est fort, même si il a du caractère, même si tout semble couler sur lui.
Depuis quelques mois donc je pensais que mon fils était enfin tranquille et il ne m'a plus du tout parlé de ces autres qui l'auraient enquiquiné. Je pensais que tout s'était enfin tassé.
Jusqu'à la semaine dernière ou une personne que je connais très bien et dont le fils est dans la même école que mon ainé est rentré chez lui en racontant à ses parents que l'empereur s'était fait embêter dans les toilettes. La maman n'a pas hésité à m'en parler et je ne la remercierai jamais assez. Pour lui en avoir parlé, je pense que son fils a été choqué par la scène, et moi choquée que l'empereur lui même ne m'en ai pas parlé.
J'ai donc tout de suite instauré le dialogue le soir avec lui, j'ai voulu savoir pourquoi il n'avait rien dit alors que d'habitude il me raconte tout , je m'en suis voulu de n'avoir rien vu et qu'il ait pu penser que ce n'était pas la peine de m'en parler.
"Lapin" " tête de carotte", des gros mots, il m' a tout raconté et si au départ, je suis partisane du faire face, ne pas reculer, et faire ressortir tout le positif en lui pour bien lui montrer que leurs attaques ne reposent sur rien, surtout quand il s'agit du physique, j'ai bien senti que là, face à ses quatre enfants, ça n'aurait servi a rien, les choses étaient déjà allé beaucoup trop loin.
Alors c'est en hésitant que j'ai prévenu la directrice, mais j'ai fini par penser que c'était la seule chose à faire. Pour ne pas que ça continue, pour ne pas que ça recommence avec d'autres, parce que quand on a déjà tout tenté, le dialogue, les menaces en retour, l'ignorance, la fuite, il ne reste à mon sens aucune autre issue.
Elle a convoqué tout le monde, elle leur a parlé, ils ont fini par avouer, et maintenant j'espère qu'ils auront compris, j'ai même envie de penser qu'ils ne recommenceront pas.
Peut être que si ce petit garçon n'avait pas parlé à ses parents de ce qu'il avait vu, peut être que si sa maman s'était dit que ce n'était que des bagarres de mômes et ne m'en avait pas parlé, l'empereur ne m'aurait rien dit, ça aurait pu durer et même empirer.
Je ne sais pas si j'ai eu le bon reflex, mais je ne le regrette pas même si ça n'a pas été facile.
On essaie avec son papa de faire de lui un petit garçon qui a confiance en lui, bien dans sa peau, dans ses baskets, mais ça n'est pas toujours aussi simple qu'on le voudrait.
Avec la rentrée au collège qui approche, des chiffres qui donnent le vertige avec 12 % d'élèves harcelés, plus ceux qui n'oseront jamais parlé, et tous ces exemples d'adolescents harcelés qui n'ont pas du comment s'en sortir, dire que je n'ai pas peur serait mentir.
Mon fils a compris qu'il pouvait tout me dire et j'espère qu'il ne l'oubliera jamais.
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